Timbuktu

Non, il n'y a pas que la Terre du Milieu au cinéma en ce moment ! Il y a aussi celle, tout aussi vaste et belle, mais bien réelle, du désert aux portes de "Timbuktu". Huit ans après le génial "Bamako", le réalisateur mauritanien Abderrahmane Sissako montre de nouveau l'emprise d'un petit groupe de fous sur toute une région, si ce n'est un continent. Cette fois, il s'agit de djihadistes bêtes à en pleurer sévissant dans la ville malienne après l'occupation islamiste de 2012. Chaque scène est magnifique – à en pleurer également –, chaque histoire témoigne d'une sorte de naïveté du mal, ou comment les hommes savent se montrer ridicules et dangereux tout à la fois. Il y a contre la terreur aveugle la sagesse des peuples (un imam y évoque le djihad intérieur : se combattre soi-même afin de s'améliorer plutôt que de persécuter les autres), il y a la résistance avec les moyens du bord, il y a surtout l'art, la poésie, l'humour (c'est souvent drôle, on rit même quelquefois à contrecœur), l'enfance, l'imagination (jamais une partie de football n'a été si bouleversante)... À Tombouctou, on parle un certain nombre de langues. On entend dans le film du bambara, de l'arabe, du français, de l'anglais, du tamasheq (la langue touareg)... Il faut parfois deux traducteurs pour un dialogue de sourds, car on tombe toujours sur plus buté que soi. On se prend à rêver que la musique si délicate d'Amine Bouhafa puisse un jour apaiser ceux qui refusent de l'entendre... car la B.O. est tout aussi sublime que les images. 

À voir aux cinémas Varda ou Ventura à partir du 26 décembre.

(Et pour ceux qui s'intéressent aux musiques touaregs, c'est ici ou là )